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Séance du 22 septembre 2007

Présents : Josette Acher, Raoudha Allouche, Stéphane Arthur, Patrick Berthier, Chantal Brière, Brigitte Buffard-Moret, Pierre Burger, Véronique Cantos, Jacques Cassier, Françoise Chenet-Faugeras, Olivier Decroix, Marguerite Delavalse, Hagar Desanti, Guillaume Drouet, Jean-Claude Fizaine, Caroline Julliot, Pierre Georgel, Jean-Marc Hovasse, Hiroko Kazumori, Arnaud Laster, Franck Laurent, Loïc Le Dauphin, Sylvain Ledda, Bernard Leuilliot, Mathieu Liouville, Pierre Loubier, Claude Millet, Claire Montanari, Florence Naugrette, Yvette Parent, Marie Perrin, Guy Rosa, Denis Sellem, Agnès Spiquel, Vincent Wallez, Judith Wulf, Choï Young, Yingxuan Zhang.


Guy Rosa présente Raoudha Allouche, maître de conférences à l'Université de Sfax, actuellement en séjour de travail à Paris et qui prépare une thèse sur Gautier et l'architecture.

Informations

Conférences :  

La fête de la science organisée par Paris VII sera ouverte à ce qu'on appelait auparavant la « Science des Textes et des Documents », c'est-à-dire la recherche en littérature. Jean Delabroy présentera à cette occasion une conférence sur « Hugo, la Science et le Songe », le 12 octobre à 16h, à la Halle aux farines (16 rue Marguerite Duras, amphi 9 E), et Paule Petitier proposera une communication sur l'Animalité au XIXème siècle, le 13 octobre, à la Halle aux farines également (Salle 227), à 11h30.

 

Félicitations :

Le Groupe Hugo adresse ses félicitations à Brigitte Buffard-Moret qui vient d'obtenir le Grand Prix de l'Académie Française - le prix Louis Barthou - pour son livre La Chanson poétique du XIXème siècle. Bernard Leuilliot rappelle que Louis Barthou était un grand collectionneur d'autographes et que la plupart des autographes de Hugo que l'on voit circuler dans les ventes publiques proviennent de sa collection.

 

Documents :

Claude Millet fait circuler des documents envoyés par M. Michel Jolland, voisin de la maison de Paul Berret, grand hugolien du premier XXe siècle. On peut y voir la reproduction d'une médaille de Hugo qu'avait reçue Paul Berret comme prix de la critique littéraire. La bibliothèque de l'équipe « Littérature et civilisation du XIXe siècle - Groupe Hugo, Groupe Balzac » recevra également un discours sur les Alpes de Paul Berret où il est question de Hugo.

 

Programme de l'année 2007-2008 :

-         20 octobre 2007 : Keti Irubetagoyena, élève à l'ENS LSH évoquera son expérience de metteur en scène dans une communication, « De la difficulté de monter Cromwell » et Pierre Loubier, maître de conférences à l'université de Paris X, parlera de l'élégie.

-         24 novembre 2007 : Aurélie Loiseleur, maître de conférences à l'Université de Nantes, parlera de « Hugo et la ménagerie du Jardin des Plantes ». Julie Anselmini, qui a soutenu à Grenoble sa thèse sur le merveilleux dans le roman dumassien, présentera une communication sur « Le Masque de fer chez Hugo et Dumas ».

-         15 décembre 2007 : Patricia Izquierdo, qui a soutenu une thèse sur les poétesses fin de siècle, parlera des « Poétesses de la belle époque et Victor Hugo ».

-         19 janvier 2008 : Florence Naugrette s'attachera à présenter la correspondance de Juliette Drouet du dernier semestre de l'année 1861 au premier semestre de l'année 1862.

-         9 février 2008

-         15 mars 2008 : Claude Millet proposera une communication sur « La Célébration dans les odes et les poèmes de Hugo ».

-         5 avril 2008

-         17 mai 2008 : Jakob Ladegaard, doctorant à l'Aarhus University (Danemark), parlera de Notre-Dame de Paris.

-         21 juin 2008

 

 Il reste donc de la place pour des propositions de communications.

 

Sur la genèse et l'édition des Misérables :

Guy Rosa annonce qu'il a terminé la transcription des trois versions des Misérables et fait part de quelques (rares) découvertes. On découvre ainsi que, dans la toute première rédaction, le personnage de Javert est réduit à un rôle mineur et entièrement fonctionnel. Le couple du poursuivi et du poursuivant n'est pas un motif originel.

Guy Rosa corrige en outre les idées reçues sur la méthode de travail de Hugo. On sait que, pour le roman et le théâtre, Hugo rédige en commençant par le début du récit et en allant tout droit vers sa fin. Il note même, par les fameux tirets en marge dont le sens avait été proposé et établi par J. Seebacher et A. Ubersfeld, la progression quotidienne. On sait aussi qu'il corrige et ajoute beaucoup, dès avant l'exil pour Les Misérables. Mais on croyait, sans le dire explicitement mais les formulations adoptées l'impliquent, que Hugo ne revenait sur son manuscrit qu'après avoir couvert une partie considérable du texte. Ce n'est pas le cas, du moins pour Les Misérables : Hugo travaille en boucle, revenant  en arrière à mesure qu'il progresse, selon un rythme tout à fait indécidable et probablement très variable. Il est donc impossible de fixer des « versions » successives du texte -sauf la première et la dernière, bien sûr- puisque les états successifs du manuscrit sont en nombre très grand. Cette pratique d'écriture, à la fois linéaire et tabulaire, confère au texte une incomparable solidité puisque ses parties sont constamment ajustées les unes aux autres.

Il faut enfin réhabiliter l'édition de l'Imprimerie Nationale, très bien faite même si son ou ses auteurs, anonymes, ne disent pas comment ils font. C'est certainement la meilleure édition, juste devant l'édition originale belge que René Journet a eu raison de reproduire pour l'édition Garnier-Flammarion. L'originale de Paris est entachée de toutes sortes d'interventions puristes et mesquines de Meurice-Vacquerie (Hugo le sait et s'en venge discrètement le jour où il note que pour toutes les ouvres de l'exil c'est l'originale belge qu'il faut reproduire). Quant à l'édition de 1880, Guy Rosa  regrette de l'avoir choisie pour l'édition Bouquins : on devrait se taire lorsqu'on ignore -et demander à ceux qui savent.

 

Bernard Leuilliot précise que c'est plutôt Francis Bouvet, directeur de collection chez Garnier Flammarion, qui est à l'origine de la reproduction de l'édition originale belge, non sur la demande de René Journet, mais sur la sienne.

 

Doctorants :

Florence Naugrette, proposant de faire une communication sur les lettres de Juliette Drouet le 19 janvier 2008, évoque Bénédicte Duthion, dont le sujet de thèse porte sur la correspondance de cette dernière, et présente Véronique Cantos, qui travaillera sur le début de cette correspondance.

 

Arnaud Laster salue le travail d'une de ses étudiantes en thèse qui a édité les lettres de Juliette écrites en 1880. Il rappelle que ces lettres, contrairement à celles de Hugo, sont très précisément datées (du moins à certaines époques), parfois à l'heure près, et qu'elles sont souvent méconnues.

 

Brigitte Buffard-Moret indique que Sébastien Mullier, qui a soutenu récemment une thèse sur Mallarmé, a rédigé un très bel article sur l'Eden chez Hugo.

 

Etudes hugoliennes :

Claude Millet et Guy Rosa signalent que le docteur B. C. W. Stephens est chargé de faire l'état présent des études hugoliennes dans French Studies.

 


Communication de Patrick Berthier : Guillemin/Hugo (voir texte joint)


Si l'on en est curieux, on peut voir et entendre ici une conférence sur ugo donnée par Henri Guillemin à la télévision en 1973.

Discussion

Sur les ouvrages que Patrick Berthier a consacrés à Guillemin :

CLAUDE MILLET, remerciant chaleureusement l'orateur : Tu as rapidement évoqué les livres que tu avais consacrés à Henri Guillemin. Pourrais-tu nous en dire un peu plus ?

 

PATRICK BERTHIER : Jean Sulivan, qui dirigeait une collection chez Gallimard, m'a commandé un livre d'entretien avec Henri Guillemin. Il m'a en outre permis d'accéder aux cartons qui contenaient les comptes-rendus de tous les livres de Guillemin. J'ai ainsi pu découvrir à quel point la critique avait été féroce à son égard. Je voulais entourer l'interview de Guillemin par des extraits de presse, mais la maison d'édition n'a voulu garder que l'entretien pour que l'ouvrage ne soit pas trop volumineux. J'ai cependant pu faire suivre le texte de l'interview par un article de Guillemin datant de 1937, « Par notre faute ».

J'ai publié les coupures de presse écartées par Gallimard dans un deuxième ouvrage, Guillemin, légende et vérité, paru chez Utovie, l'éditeur qui conserve aujourd'hui le fonds Guillemin.

 

Témoignage :

BERNARD LEUILLOT : J'ai gardé deux ou trois lettres de Guillemin. Dans l'une d'entre elles, il me mettait en garde contre la tentation de prétendre à une chaire de l'université de Fribourg. Il se disait « contre le jésuitisme de l'université suisse ». J'ai aussi en ma possession un document confié par Jean Massin qui établit la liste des écrits de Guillemin sur Hugo de 1947 à 1957. Cette liste permet de se rendre compte de l'éventail des revues dans lesquelles il publiait. Cela va du Figaro littéraire aux Temps modernes en passant par de nombreux périodiques suisses. Les Temps modernes publient des ouvrages historiques de Guillemin, en particulier celui qui s'attache aux origines de la Commune. C'est là qu'il a commencé à réaliser son rêve d'écriture quasi-romanesque. Cet ouvrage est d'ailleurs à l'origine de ce que Sartre connaît de l'histoire de France. La rencontre entre Sartre et Guillemin est intéressante, dans la mesure où l'on pourrait penser que ces deux personnages n'étaient a priori pas fait pour se fréquenter.

 

PATRICK BERTHIER : Ce que vous racontez illustre parfaitement l'anticléricalisme dont Guillemin faisait preuve. Il haïssait Veuillot et Falloux, par exemple. Vous avez raison de souligner l'extraordinaire variété des revues dans lesquelles il publiait. J'ai même découvert qu'il avait publié deux articles - et lui-même n'arrivait pas à le croire - dans un journal intitulé La Revue française de l'élite européenne. Pour ce qui est de Sartre, il faut préciser qu'ils se connaissaient de longue date car ils étaient tous deux élèves de l'École Normale Supérieure. Ils ne se portaient donc pas seulement un intérêt intellectuel.

 

Guillemin collectionneur :

PIERRE GEORGEL : Guillemin était un grand collectionneur d'autographes. Que pourriez-vous dire sur ce sujet ?

 

PATRICK BERTHIER : J'ai peu de renseignements à ce propos. On a parfois reproché à Guillemin d'être un véritable prédateur de manuscrits. J'ai, pour ma part, du mal à le voir ainsi. J'ai essayé de lui parler de sa collection, mais il ne voulait pas aborder le sujet, pour des raisons fiscales, disait-il. Je sais que ses enfants ont très vite vendu sa collection, qui était moins importante qu'on aurait pu le croire. Une part importante de ses propres manuscrits a été confiée à la bibliothèque municipale de Neuchâtel.

 

Sur les motivations de Guillemin :

GUY ROSA : Je préfère Guillemin historien que critique. Son ouvre historique est magnifique et très importante. On pourrait le qualifier de marxiste adepte de la théorie du complot. Il est curieux que les historiens dits « professionnels » y fassent rarement référence.

On  peut toutefois se demander ce qui « faisait marcher » Guillemin. Ce n'était pas l'argent, et pas la gloire non plus.

 

PATRICK BERTHIER : Lui disait qu'il écrivait par « passion de la vérité ».

 

GUY ROSA : La vérité demande parfois qu'on y aille plus lentement. Si la quête de la vérité était sa seule motivation, ses écrits seraient plus austères.

 

PATRICK BERTHIER : Il est vrai qu'ils ne le sont pas. Un historien, Durosel, avait dit dans La Revue française de science politique que, dans les ouvrages de Guillemin, l'histoire était un mélodrame avec traître où le prolétariat jouerait le rôle de l'ingénu.

 

GUY ROSA : Cette comparaison n'est pas sérieuse. Guillemin croyait à la lutte des classes.

 

 

Guillemin et la « critique-passion » :

GUY ROSA : Guillemin avait un talent d'écrivain extraordinaire. Parfois je préfère son Victor Hugo par lui-même à Victor Hugo lui-même !

Cela dit, sa manière d'aborder les écrivains par les seuls thèmes de l'argent, du sexe et de Dieu est gênante. Tout cela, ce sont des objets sur lesquels le je se jette -de préférence avec avidité. Autrui manque : la famille, les amis, la politique, l'art et la science. Il est vrai que le plan standard des dissertations de philo -le moi, le monde et Dieu- n'est pas moins ego-centré.

 

PATRICK BERTHIER : Il est vrai qu'il en parle peu.

 

FRANCK LAURENT : Ce que Guillemin a écrit sur la sexualité de Hugo est très connu. Il me semble malheureusement que Guillemin enfermait la question entre deux pôles chrétiens : la contention et l'absence de contention. D'après lui, il y aurait d'une part les carnets de Hugo, signes de sa sexualité débridée, et d'autre part une morale de l'abstinence, qu'il développe dans ses romans. C'est oublier toute la complexité de Hugo, et une idée qui, chez lui, va s'épanouissant, celle d'un naturalisme cosmique du sexe.

Certes, la motivation principale de Guillemin est de dépoussiérer les statues des écrivains. Néanmoins, il est à l'origine, que ce soit à propos de Hugo ou de la Commune, de légendes qu'il dénonçait lui-même. On passe finalement d'une légende à une autre. Cet état de fait limite son ambition.

 

PATRICK BERTHIER : Je pense qu'il serait déçu d'entendre ce que tu dis. Ce n'était certainement pas ce qu'il voulait. Il a assumé ses emportements et sa critique passionnelle dans un article : « Suis-je coupable de critique-passion ? ».

 

CLAUDE MILLET : Henri Guillemin avait le mérite d'être anti-conformiste à une époque où la critique était surtout hagiographique. Je trouve par exemple que son livre sur Vigny - très critique à l'égard du poète - est extrêmement plaisant et libérateur. Certes, Guillemin est parfois dans l'excès, mais il y a quelque chose de frais dans sa violence.

 

PATRICK BERTHIER : Il était en effet contre ce qu'il appelait « l'histoire bien élevée ». Il revendiquait le fait d'avoir parlé des femmes et des comptes de Chateaubriand. On ne faisait, avant lui, que célébrer sa phrase et son style. Guillemin était fasciné par cet auteur. Il avait lu quatre fois l'intégralité des Mémoires d'outre-tombe.

 

Guillemin éditeur :

 ARNAUD LASTER : Je vais prononcer des paroles sévères à l'égard de Guillemin, mais je comprends parfaitement la sympathie que vous aviez pour lui, d'autant que je l'ai moi-même ressentie. Guillemin, vous l'avez dit, explique que, pour connaître un écrivain, il faut que l'on sache l'attitude qu'il a à l'égard de Dieu, des femmes et de l'argent. Hugo a dit pratiquement le contraire. Je ne me souviens plus de la citation exacte, mais elle ressemble à peu près à ceci : « quel Dieu j'ai, quelle femme j'aime, nul n'a le droit de s'en informer. » Cette remarque est à l'opposé de la démarche de Guillemin et de ses dérives.

Comme l'a rappelé Franck Laurent, Guillemin est à l'origine d'une légende biographique de Victor Hugo. Il a en particulier contribué à installer l'image d'un Hugo obsédé sexuel. Sa façon de publier ses carnets n'était absolument pas scientifique. Il cherchait les phrases qui lui semblaient pouvoir être interprétées de façon sexuelle. Le reste, ce qui est de l'ordre du politique ou de l'histoire, disparaît. Guillemin prête en outre une oreille complaisante à des récits faits sur Hugo sans examen critique réel.

C'est un simple détail qui m'a rendu méfiant à l'égard de son travail. Dans Victor Hugo par lui-même, Guillemin dit qu'on fait de la musique à Jersey ou à Guernesey, et que Hugo écrit : « vous savez que je n'aime pas le piano mais. ». Il laisse des points de suspension dans son édition. Je suis allé voir ce qui se cachait derrière cette ponctuation. Hugo avait poursuivi sa phrase en disant quelque chose comme : « mais sous les mains de Mlle Unetelle, c'est un cour qui chante, etc. ». La suite de la phrase signale donc qu'il était capable d'éprouver une émotion musicale, ce que ne montrait pas la citation de Guillemin. Or, un jour, j'ai entendu Guillemin, interrogé à propos de la musique, dire : « c'est un art qui ne me touche pas ».

 

PATRICK BERTHIER : Il est vrai qu'il se disait totalement fermé à la musique, bien qu'il ait été un proche ami de Mengelberg.

 

ARNAUD LASTER : On comprend, par l'exemple que j'ai donné, à quel point Guillemin se projetait dans Hugo. Il lit Hugo selon ses propres convictions.

Ce qui me gêne chez lui, c'est son mauvais travail d'édition. Lorsque j'ai publié L'Intervention chez Bouquins, je suis allé voir les manuscrits de Hugo. Je connaissais la version de Guillemin, et je me suis rendu compte qu'elle fourmillait d'erreurs, ce qui était problématique puisque tout le monde l'avait ensuite recopiée, qu'il s'agisse de La Pléiade ou de l'édition Massin.

J'ai parlé de ces erreurs à Journet, qui, lui, était très rigoureux. Il m'a dit que le mode d'édition de Guillemin était bien connu, mais que ces erreurs étaient compréhensibles dans la mesure  où il n'avait pas beaucoup de temps pour recopier les manuscrits qu'il consultait chez Jean Hugo.

 

GUY ROSA : La famille Hugo a en effet mis longtemps l'embargo sur certaines informations (qui concernent, par exemple, Juliette Drouet ou Léonie Biard). On peut donc être reconnaissant à Guillemin d'avoir balayé ces cachotteries, accédé aux manuscrits et de les avoir publiés, même avec des erreurs.

 

PIERRE GEORGEL : Cela dit, une grande masse d'inédits étaient à la BNF, et il n'y avait pas tant de manuscrits littéraires que cela chez Jean Hugo ; il s'agissait surtout de lettres familiales. Guillemin aurait pu se rendre facilement à la bibliothèque nationale et prendre du temps pour éditer sans erreur les textes de Hugo.

 

Eléments biographiques :

JOSETTE ACHER : Que pourriez-vous dire sur la famille de Guillemin ?

 

PATRICK BERTHIER : Guillemin est né un an après un enfant mort qui portait le même prénom que lui. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles il était sensible à tout ce qui pouvait se rapprocher de cette expérience chez un écrivain. Que l'on songe à Lamartine perdant sa fille, ou à Hugo. Lui-même a eu un fils décédé à l'âge de deux ans et demi, puis quatre autres enfants. Lorsqu'il évoque le Voyage en orient, il parle du deuil de père de Lamartine avec une vibration qui est de l'ordre de l'identification. Il perçoit la famille comme un équilibre extrêmement fragile.

 

Guillemin orateur :

FRANCOISE CHENET : Je me souviens avoir vu Guillemin parler de Rousseau à la télévision. C'était un orateur extraordinaire qui avait un timbre de voix remarquable.

 

BERNARD LEUILLOT : Ses interventions lors des colloques étaient impressionnantes. Il était capable de réciter des dizaines de vers de Hugo par cour.

 

FRANCOISE CHENET : A-t-on des archives télévisuelles où il parlerait de Hugo ?

 

PATRICK BERTHIER : Il a participé à de nombreuses émissions de télévision, et tout particulièrement en Suisse et en Belgique. La plupart d'entre elles portent sur l'histoire et sont rediffusées régulièrement par la chaîne Histoire. Je ne connais, pour ce qui concerne Hugo, que des enregistrements audio.

 

JACQUES CASSIER : Il y a eu, il me semble, six émissions télévisées de Guillemin consacrées à la littérature. Trois portent sur Hugo et une sur Péguy. Elles sont parfois diffusées sur la chaîne Histoire.

 

PATRICK BERTHIER : Les éditions Utovie, qui conservent le fonds Guillemin, diffusent des cassettes audio. Les derniers témoignages de Guillemin sont des enregistrements réalisés par la Suisse romande. Il avait du mal à parler ; on l'enregistrait donc par séquences de trois minutes. Le montage final permettait de faire entendre un Guillemin très ferme dans ses propos et très persuasif. Il croyait beaucoup à cette forme de communication et à la force de l'oralité.

 

 Claire Montanari


Equipe "Littérature et civilisation du 19° siècle"
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