A la rentrée parlementaire de 1851, la droite était si convaincue – peut-être, entre autres, par les indiscrétions de l’ancien préfet de police Carlier – de l’imminence d’un coup d’état du prince-président qu’elle entreprit de pourvoir aux moyens d’y résister. La constitution donnait explicitement à l’Assemblée le pouvoir de fixer « l’importance des forces militaires établies pour sa sûreté » et d’en disposer, mais sans entrer dans le détail. Cela se trouvait dans un décret du 11 mai 1848, mais on pouvait tenir que, antérieur à la Constitution, il était caduc. La proposition des questeurs, Baze, Le Flô et de Panat, se contentait de promulguer en loi le texte de ce décret, et d’en ordonner la mise à l’ordre de l’armée et l’affichage dans les casernes. Il donnait au président de l’Assemblée – voire aux questeurs, si un amendement était voté en ce sens – le pouvoir de requérir la force armée et toutes les autorités.

Les républicains craignirent que la droite monarchiste ne s’en servît, via le général Changarnier, pour procéder à une mise en accusation du président, suivie d’une révision de la Constitution en vue d’une restauration. La gauche, pas en totalité mais Hugo compris, refusa ses voix et, avec celles des bonapartistes, la proposition fut rejetée (17 novembre 1851, 408 voix contre 300).

Son adoption eût-elle changé le cours de l’histoire ? Peut-être car elle aurait contraint le président à agir immédiatement, alors que tout le monde était sur ses gardes et donc avec des chances de succès très inférieures. Ce fut du moins le calcul des militaires membres de l’Assemblée –Le Flô, Cavaignac, Charras, etc. – qui votèrent tous en faveur de la proposition, toutes opinions confondues. Sans doute aussi savaient-ils mieux que les civils qu'il n'y avait pas grand chose à redouter de leur camarade Changarnier.

Hugo décrit l’ensemble de la situation politique à cette date en IV, 10.