Cette séparation du Comité de résistance à peine formé est étrange et semble signaler un dissentiment, voire une scission, qui devient explicite lorsque Hugo va retrouver, le lendemain matin 3 décembre, Carnot, Jules Favre et Michel de Bourges – voir II, 1. A la réunion chez Grévy le Comité sera de nouveau au complet, mais c’est après l’échec de la tentative de soulèvement du faubourg Saint-Antoine et la mort de Baudin.

Il n’est pas surprenant en revanche que, malgré l’autorité remise au Comité de résistance, les représentants décident d’une (voire deux) nouvelle réunion ; celle-ci n’est pas achevée : elle a décidé d’un exécutif, reste à fixer une ligne de conduite. Ce sera fait rue Popincourt, « toujours à proximité du faubourg Saint-Antoine », mais en l’absence de Carnot, Jules Favre, Madier de Montjau et De Flotte qui arrivent chez Cournet après la fin de la réunion. Ils y apprennent le rendez-vous du lendemain à la salle Roysin ; Carnot, Jules Favre et Michel de Bourges s’abstiennent de s’y rendre. Ces trois là seront exceptés du décret de proscription.

D’une manière générale, le récit de Hugo, soucieux de figurer une résistance unie, atténue les divergences – celle-ci n’est pas la seule – au sein de la gauche, sans les effacer cependant tout à fait.

Elles n'eurent sans doute pas une bien grande part dans l'échec de la résistance suffisamment déterminé par d'autres causes plus profondes. Il n'empèche que la gauche républicaine et démocratique n'est pas épargnée, en décembre 51, par cette division entre modérés et radicaux qui parcourt toute son histoire depuis l'affrontement entre Girondins et Jacobins jusqu'à celui entre socialistes et communistes. Face à elle, l'attitude de Hugo est déjà ce qu'elle sera après la Commune (mais pas durant le Second Empire), conciliatrice, quoiqu'il penche lui-même du côté radical.