Les commissions militaires jugeaient, selon les lois ordinaires ou
celles, exceptionnelles, du coup d’Etat, dans le cadre de l’état de siège
décrété à Paris et dans de nombreux départements. Les tribunaux civils
s’activaient de leur côté. Devant le nombre des personnes arrêtées, les
« commissions mixtes » furent organisées par une circulaire du 3
février 1852, légalisée par un décret en mars. Composées, par département, du
préfet, du général de brigade et du procureur ou de leurs représentants (ce qui
fut le cas le plus fréquent en descendant jusqu’à des fonctionnaires tout à
fait incapables), elles jugeaient sans instruction – donc souvent sur de simples
fiches de police –, sans entendre les accusés, « sans procédure, sans
audition de témoins, sans débats contradictoires, sans défense des prévenus,
sans jugement public » (Ténot). L’échelle des peines allait de la
surveillance à la déportation, à Cayenne ou en Algérie, instituée par le décret
du 8 décembre 1852. Elles étaient dispensées de motiver leurs décisions et
avaient un mois pour achever leur travail. Elles jugèrent 26 884 détenus
et prononcèrent 239 déportations à Cayenne, 9581 en Algérie, 1520 expulsions ou
éloignements, 2827 internements, 5868 surveillances de formes diverses, 892
renvois à la justice civile ou militaire, 5857 mises en liberté. Leur sévérité
et leurs injustices criantes furent d’abord corrigées par diverses mesures de
clémence. Puis, fin mars 1852, trois commissaires furent envoyés dans les trois
principales régions de résistance au coup d’Etat (Sud-est, Sud-ouest et Centre)
pour réexaminer les condamnations. Instruit par l’expérience –voir ci-dessus
(lien à l’index)–, Quentin Bauchart
prononça, dans la première, plus de 3400 grâces, les deux autres un millier
chacun. Plus tard, des grâces présidentielles ponctuelles atténuèrent la
répression. Au bout d’un an le nombre des déportés en Algérie avait été réduit
des deux tiers.